La république, l'abstention, l'extrême-droite, et les français...

Publié le 08/01/2016
Par Yazan

J'esquissais dans mon dernier billet une ébauche du paysage politique français au regard de huit ans de spectrographie électorale (voir figure 1 ou  le front national ne représente pas 30% de la population française).

Evolution des sensibilités politiques en france depuis 2007 - Résultats nets
Figure 1: Résultats des scrutins électoraux (1er tours) depuis 2007 en France (en pourcent des inscrits)

Nulle surprise ici, le grand gagnant est l'agnosticisme politique (la réunion des abstentionnismes et des votes blancs ou nuls). Le choix premier des français est justement de ne pas choisir! Quant au front national qui se nargue représenter "30% de la population française" à l'issue des régionales de 2015, il ne pèse en réalité que 11,2% de cette population française (13.4% toutes sensibilités d'extrême droite réunies). Sans doute ont-ils confondu "population française" et "suffrages exprimés? La nuance est de taille et l'élément de langage loin d'être anodin pour un FN qui se doit de donner l'illusion d'une dynamique conquérante afin de mobiliser son électorat. Mais qu'en est-il vraiment?

En corrélant 8 années de résultats électoraux des différentes familles politiques avec le taux d'agnosticisme (en % d'inscrits et non % d'exprimés afin de bien refléter la société française), nous pouvons mieux appréhender le comportement de l'électorat sur la période étudiée. Pour ce faire, je vous propose une méthodologie par moindres carrées (i.e. des régressions linéaires d'ordre 1) telle que précisée en figure 2 ci-après.

Explications d
Figure 2: Méthodologie d'évaluation des corrélations entre deux courants politiques

Ces corrélations ont ainsi été évaluées pour l'extrême gauche, la gauche, le centre, la droite et l'extrême droite (cf. figure 3).

Etude des relations entre abstention et courants politiques français (extrême gauche, gauche, centre, droite et extrême droite)
Figure 3

De ces premiers résultats, nous pouvons projeter l'issue d'un scrutin électoral en situation fictive d'agnosticisme nul (c'est justement cela le reflet d'une société française - cf. figure 4).

Projection des sensibilités politiques de la population française sur la période 2007-2015
Figure 4: Projection des sensibilités politiques de la population française sur la période 2007-2015

Enfin, puisque nous obtenons en figure 3 un coefficient R2 médiocre pour ce qui est de la relation entre extrême-droite et agnosticisme politique, il nous faut étudier de plus près la corrélation entre ce vote extrême et les autres courants politiques (cf. figure 5).

Correlations de voix pour les differents courants politiques avec les votes d extreme droite, en pourcent d
figure 5

Quelle interprétation faire de ces différents résultats? Nous voyons se dessiner en figure 3 des corrélations de bonne qualité pour ce qui est de l'adhésion envers les partis traditionnels "républicains" (droite, gauche et centre): C'est au détriment de ces courants politiques que s'opère le vase communiquant de l'agnosticisme. Ce constat est intéressant, il signifie que ce ne sont pas vraiment les déçus des partis "traditionnels" qui viennent alimenter le vote d'extrême droite, ces déçus là préfèrent s'abstenir plutôt que de voter front national. Ce n'est pas plus l'extrême gauche, celle-ci aurait même tendance à grimper en phase avec l'extrême droite: Ces deux courants s'appuient sur des déclencheurs communs.

Au final, aucune corrélation ne peut être validée en ce qui concerne l'extrême droite, ses coefficients R2 sont tous sans exceptions extrêmement bas exprimant une volatilité importante de son électorat. Ses scores répondent avant tout à de l'événementiel, et lorsque l'extrême droite grimpe, elle picore ses voix de manière diffuse, mais toujours sous le seuil de 14% des français: ce vote est avant tout factuel.

Quant à cette petite infographie sur les sensibilités de la population présentée en figure 4, commençons par préciser qu'il ne peut s'agir ici que d'une tendance au vu de la méthode employée. Certes les marges d'erreur sont moindres pour les scores de la droite et de la gauche, et se n'est pas une surprise, les français comme leurs gouvernants (socialistes inclus) seraient plutôt de droite. Mais le score de l'extrême droite (8.66%) doit par contre être considéré avec des marges d'erreurs non négligeables dues aux mauvaises corrélation: Elle pourrait raisonnablement rassembler jusqu'à 15% des inscrits aux présidentielles de 2017... Néanmoins, avec une abstention de l'ordre de 20%, cela ne passera pas!

Cette abstention devient ainsi la clef du problème. Certes, elle ne profite à personne et encore moins au front national. Mais elle révèle plus nuisible pour certains (particulièrement la droite et la gauche dans une moindre mesure) et dans un contexte d'électorat frontiste particulièrement mobilisé, elle pourrait alors accidentellement le favoriser!

Les partis traditionnels ne pourront éternellement agiter la crainte de l'extrême droite dans le but de rameuter leurs électorats. Ils ne devraient pas plus s'aventurer sur le terrain politique de cette extrême droite puisque ce n'est pas ce que souhaitent leurs déçus... Une remise en cause s'impose, comprendre pourquoi tant de français préfèrent s'abstenir... Et cela ne pourra que passer par un examen de conscience inédit de la part de ces bons vieux partis traditionnels. Je crains qu'ils ne soient pas prêts pour cela. Il y a pourtant urgence, sans quoi, il finira bien par advenir, cet accident!!! Lorsque moins de 15% des français suffiront pour propulser une blonde à l'Élysée... #VDM


 



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